Deuxième semaine ... pas encore sorti ...


24 mars : Pourvu que je passe à côté !


Un peu inquiet, ce matin …

 

Côté traitement possible, j’avais un petit espoir … le sympathique et folklorique docteur marseillais me paraissait fiable et crédible à vouloir soigner les gens aux premiers symptômes, dès la positivité acquise, sans attendre leurs derniers râles, par des médocs aux contre-indications, à priori, bien établies.

 

C’était sans compter la faculté, sa rigueur, encore plus administrative que scientifique et sa suffisance, à la sienne égale. On fit monter aux créneaux la fine fleur : il fallait des gens à la réputation au moins comparable à la sienne : il nous dire d’agir avec prudence, et surtout « cachons (dans nos pharmacies) ce médoc que nous ne saurions voir ».

 Les choses allaient leur train, cependant, mais l’homme en faisait sans doute trop : beaucoup de test (on en manquait justement), une file devant l’établissement, et puis aussi, son ego et ses allures de soixante-huitard attardé. Perso, de ce côté, j’ai toujours préféré les soixante-huitards attardés à ceux qui, révolution faite, sont devenus « chef de choucroute à Carrefour », comme disait le regretté Desproges.

 Je lu, je vis quelques interventions de ces médiatiques influenceurs… Mauvais esprit, je vérifiais, sur le site d’une maison d’éditions médicales, leur biographie, mais aussi, plus intéressant, les liens d’intérêts dont ils avaient fait état. Petit échantillonnage : MSD, Gilead, Janssen, Abbott : prestigieux laboratoires pharmaceutiques… Le plus modéré ne faisait état que de Sanofi.

 

Bon, loin de moi l’idée d’en tirer des conclusions hâtives, mais on aurait eu le souci de replacer quelques molécules de choix dans la course au traitement que l’on aurait pas agi autrement : retarder la mise en œuvre de la chloroquine, la réserver aux sub-claquants, marginaliser ses promoteurs … Pas joli-joli … même si, avec l’âge, je finis par aimer les gens et comprendre que des chercheurs, auxquels on n'a offert, pour leurs recherches, que la possibilité de se lier, clause de loyauté à l’appui, aux puissantes structures de l’industrie privée, n'en fasse quelque peu la promotion.

 

Côté protocole de traitement des malades, ça ne m’inspire pas plus. Si j’ai bien compris il s’agissait de passer déjà par son téléphone, son ordinateur, essayer de contacter son médecin traitant habituel, ou peut –être une structure dédiée, mais sans déplacement ni contact… Il faudra tenir ainsi jusqu’aux derniers symptômes, poumons bloqués, pour être, si Dieu veut et s’il en reste, accéder enfin aux lits et urgences hospitalières … Pas rassurant, cette façon de retarder à l’extrême l’hospitalisation des malades … Je finirais par avoir l’impression qu’après nous avoir vendu comme excellentes les interventions en médecine ou chirurgie « ambulatoire », on est aussi en train de faire la même chose avec nos dernières heures : ça gagne des lits mais ça fait peur !!!

 

Tiens, il y a juste quelques minutes, j’apprends que notre (hélas) Président installait son Comité scientifique ad’hoc, dirigée par la prestigieuse Françoise Barré-Sinoussi, co-prix Nobel et co-découvreuse du virus du sida. Beau titre, à cela près que, sur la photo de famille célébrant cette gloire, il manquait le professeur Chermann, co-découvreur lui aussi et écarté pour ce qu’il décrit comme « un tel lobbying » dans cette affaire… Je n’en pense rien, un peu compliqué cette sombre affaire, si vous voulez, un article du Monde :

 

https://www.lemonde.fr/planete/article/2008/12/09/un-decouvreur-de-trop_1128779_3244.html ...

 

Je le répète, je n’en pense rien, d’autant que la professeur Barré-Sinoussi ait aussi été très affectée par cette affaire. Mais, décidément, tant d’intérêts divergents, tant d’égos dressés, ce n’est pas cela qui donne confiance dans la conduite de cette « guerre » (c’est pas de moi …) contre la maladie.

 

 

Une fois évacuées ces amères remarques, et pour revenir à des choses enfin positives, je vais, de ce pas me faire une excellente boisson chaude à base de citron et de décoction de quinquina (ça contient un peu de quinine naturelle, on ne sait jamais...) et, ensuite, avant ma promenade « mono-kilométrique », je ferais mes exercices de respiration en « cohérence cardiaque » … Portez-vous et faites gaffe : ces temps, il vaut mieux être en santé.

 Pour les exercices respiratoires, sur Youtube, j’ai trouvé ça que j’aime bien :

 

https://www.youtube.com/watch?v=dGJkzyKHKUE

 

 Pour finir en riant … j’imagine, sur un vieux numéro des nouvelles d’Alsace, cet article (5 juillet 1885)

 

« On est très inquiet pour le petit Joseph Meister qui a été hier mordu par un chien, dont l’état de ce jour ne fait aucun doute, et qui était donc bien atteint de la rage. Les parents placent leurs espoirs dans les travaux du Professeur Pasteur qui, avec son équipe médicale, développe un sérum expérimental contre cette terrible maladie….

 Cependant, il faudra attendre la prochaine réunion de l’Académie de Médecine avant savoir si une première expérimentation humaine de ce sérum peut être autorisée …"

 

du (13 Juillet 1885) – "on lit dans les avis de décès …"

 

Allez, à demain.


25 mars : le blues, c'est beau


Fatigué des nouvelles, débats, discours qui forment le bruit de fond de ma TV : brouhaha incessant, tsunami de paroles inutiles, inexactes ou mensongères… ça use, ça finirait par nous atteindre, et, à trop les suivre, altérer notre bon sens, celui qui nous fera triompher de cette sombre période. 

Je regarde de vieilles images … 

 

2013 au Népal. Nous commençons notre marche autour du massif du Manaslu.

Une très large vallée, semblable à nos vallées glaciaires alpines … juste deux fois plus grande. C’est leur « premier automne », on sort de la mousson, la température est encore chaude et le temps humide. La nature est généreuse et les récoltes promises. Pour un peu, dans ce pays d’agriculture et de subsistance, on parlerait de richesse.

Notre guide parle un français hésitant et sa prononciation est approximative, mais nous nous comprenons… J’ai beaucoup parlé avec lui, nous sommes devenus amis, et pas seulement sur FB. Il m’a parlé de la vie dans les villages. Les champs qui procurent tout le nécessaire, sauf catastrophe. On y vit bien, heureux et solidaires. Juste un petit souci : l’argent … il ne vient que de l’extérieur ou de l’excédent des récoltes. L’école des enfants est payante et, si par malheur on doit financer une intervention à l’hôpital lointain, il faudra peut-être sacrifier les économies de l’année. Le paradis, ce n’est pas seulement les champs, les étoffes, les papillons et les fleurs.

   

Nous, nous admirons la splendeur de ce pays. C’est fête, leur grande fête : on a dressé de grands manèges avec quelques poutres de bois, de hautes balançoires de bambou, les enfants en profitent et jouent en liberté. Notre marche est lente, nous voudrions en être, mais nous ne produirons que quelques photos : enfants, fleurs et papillons. Nous passons, étrangers, tels des extra- terrestres …

 

 Nous sommes encore dans la basse vallée, nous cheminons sur une vraie piste, des gens nous croisent.

 

A un détour, photo :

 

Une fille, un garçon, un chien.

Le garçon porte un panier d’osier, l’un de ceux que l’on appuie par une sangle sur le front, et dans le panier, la grand’mère est assise, une couverture sur les jambes, une autre sur la tête.

Charmant tableau de famille : je me fais peut-être un film, mais, de voir ce jeune couple s’occuper ainsi de son aïeul, ça fait bizarre dans notre monde de familles « couples », les autres au loin, et aussi, parfois, quand ça se passe mal, les tout-vieux en Ehpad …

 

 

 

Je reviens dans ce monde : les images affreuses, les vérités sordides des plus anciens partant avec, dans leur dernier regard, non pas le visage des êtres aimés, mais celui de la larmoyante amie, l’infirmière qui, seule, les a accompagnés. Je sais, la valeur et le poids de ce dernier regard : le soutenir, comme en être privé, c’est terrible… il y a des gens dont c’est le métier.

 

 

J’ai déjà posté sur FB mais, pour eux (elles) la production d’un « slameur » suisse 

https://www.facebook.com/rts.ch/videos/210484860271828/

   

Je poursuis, je me rappelle des deux dernières strophes du Bateau Ivre : en fait, mon blues à moi.

   

Si je désire une eau d’Europe, c’est la flache, étroite et noire 

Où, vers le crépuscule embaumé 

Un enfant accroupi, plein de tristesse, 

Lâche un bateau fragile comme un papillon de Mai. 

 

Je ne sais plus, baigné de vos langueurs, ô lames, 

Enlever leurs sillages aux porteurs de cotons, 

Naviguer sous l’orgueil des drapeaux et des flammes 

Ni nager sous l’œil horrible des pontons. 

 

 

A demain, courage à tous les "soignants" ...


26 mars : enfin, j'ai ri ...


 

 

Bêtement, d’ailleurs : une simple image. Tout un aéropage sous une tente : est-ce bien raisonnable en cette période de confinement. Des gens graves, et au milieu, la figure juvénile de Jupiter lui-même, mais elle est couverte d’un masque chirurgical.

J’ai ri bêtement : sur une infirmière en blouse, non, mais sur ce costume orné de la légion d’honneur, ou sur un gradé de gendarmerie en tenue d’apparat, si.

 

 La parole est mesurée, trop mesurée, des choses connues et des mots sans poids. Ces temps, on mélange tout : la peur de la mort et celle des sous qui manqueront à nos entrepreneurs.

 

Et puis, l’on inaugure un « hôpital de campagne » sous tente de 30 places, ce n’est pas « MASH » et sa bande d’héroïques et paillards chirurgiens… ce n’est qu’un petit hôpital de campagne… L’on a vu, en un temps presque aussi limité, les chinois en édifier un de 1.000 lits. On a vu aussi ce hall d’exposition espagnol transformé en quelques heures en une salle de tri et de soins…. la représentation est manquée.

 

On avait pourtant tout bien préparé : l’annonce avait été faite, les auteurs avaient écrit au plus juste, on avait soigné la pièce et la scène et l’on avait, comme d’habitude, placé sur le réseaux sociaux la claque indispensable. Il est vrai que notre président a fait beaucoup d’effort pour assurer le professionnalisme de sa communication. Mais baste, quand la pièce est mauvaise …

 

Je suis d’une époque où notre Zeus nous gratifiait d’un théâtre autrement plus dramatique. Les discours, les interviews du Grand Charles : le ton dramatique, le rythme des phrases … Je me demande d’ailleurs, s’il avait vraiment besoin que l’on écrive ses discours. Je ne l’aimais pas, mais j’admirais la pièce.

 

Et là : on passe du Don Juan, de la statue du commandeur à une pièce de boulevard écrite pour les voyages organisés du troisième âge.

 

A ce propos, Alfred de Musset « une soirée perdue » … les vers ne sont pas parfaits : à l’époque, ils se produisaient au kilomètre :

 J'étais seul, l'autre soir, au Théâtre Français,
Ou presque seul ; l'auteur n'avait pas grand succès.
Ce n'était que Molière, et nous savons de reste
Que ce grand maladroit, qui fit un jour Alceste,
Ignora le bel art de chatouiller l'esprit
Et de servir à point un dénouement bien cuit.
Grâce à Dieu, nos auteurs ont changé de méthode,
Et nous aimons bien mieux quelque drame à la mode
Où l'intrigue, enlacée et roulée en feston,
Tourne comme un rébus autour d'un mirliton.

 

Laissons nos indispensables pitres à leur tragi-comédie, et retournons à la poésie, en espérant qu’un jour nous la retrouverons :

J'écoutais cependant cette simple harmonie,
Et comme le bon sens fait parler le génie.
J'admirais quel amour pour l'âpre vérité
Eut cet homme si fier en sa naïveté,
Quel grand et vrai savoir des choses de ce monde,
Quelle mâle gaieté, si triste et si profonde
Que, lorsqu'on vient d'en rire, on devrait en pleurer !
Et je me demandais : Est-ce assez d'admirer ?
Est-ce assez de venir, un soir, par aventure,
D'entendre au fond de l'âme un cri de la nature,
D'essuyer une larme, et de partir ainsi,
Quoi qu'on fasse d'ailleurs, sans en prendre souci ?

 

Tiens, pour revenir au quotidien et avant d’aller faire quelques indispensables achats, cet avisé conseil du médiatique docteur Cymes : Au supermarché, vos achats ont peut- être été touchés, infectés avant de passer entre vos mains … pensez-y … Nettoyer, nettoyer ces objets, ne vous contentez pas des incomplètes mesurettes que l’on vous rabâche jusqu’à la nausée, réfléchissez plutôt, pensez à tout …

 A +

 


27 mars : des bulles de savon


 

Hier après midi, la TV en fonds sonore : une chaîne d’information, des commentateurs « prestigieux », jusqu’à une ancienne ministre de la santé (dommage, ses vaccins excédentaires ne peuvent nous servir aujourd’hui). Mais surtout, toutes les heures, demi-heures, le bulletin et les reportages de ce superbe TGV portant une vingtaine de sub-claquants alsaciens vers des hôpitaux angevins disposant encore de quelques lits et appareils.

 

On nous montre tout, avec application : l’intérieur des wagons, les ambulances attendant leur arrivée, prêtes à les conduire de la gare à leur lit, leur planche de salut. On nous explique les précautions prises, la puissance des moyens. C’est magnifique, je suis comme enfant, quand je voyais s’échapper du petit cercle tout une myriade de bulles de savon.

 

Plus tard dans l’après- midi, on reviendra à l’essentiel : la situation économique, la crise que l’on essaye de prédire, d’en expliquer l’ampleur, d’envisager quelques solutions … Mais bon, il y a déjà pas mal de temps que l’on sait qu'en la matière, les choses sont aléatoires, totalement imprévisibles et que leurs cicatrices ne se voient que sur les plus faibles…

Tant qu’à perdre mon temps en écoutant, je retourne au TGV…

 

Sur l’écran d’en face (mon ordi) c’est le décret tant attendu sur l’usage de l’Hydrochloroquine. Quelques-uns n’ont pas tout lu : ils triomphent, pensant que notre aimable professeur marseillais avait enfin gagné et que ce traitement allait enfin profiter aux malades.

 

Je prends mes lunettes : ce ne sera qu’au sein des hôpitaux, malades gravement atteints et au choix, en concurrence avec d’autres anti-viraux expérimentaux… Je continue ma lecture : « La spécialité pharmaceutique PLAQUENIL© et les préparations à base d’hydroxychloroquine ne peuvent être dispensées par les pharmacies d’officine que dans le cadre d’une prescription initiale émanant exclusivement de spécialistes. (en fait, les seules indications antérieures, hors COVID 19).

  Je comprends : il est désormais impossible de se faire prescrire la chose aux premiers symptômes et par son médecin : ils ont osé, ils ont atteint leur but.

Aux hôpitaux, on ne dispensera la chose qu’aux « cas graves » … en fait, l’hôpital étant en bout de chaine, ça sent déjà très mauvais, le traitement arrivera un peu tard sans doute et l’on comptera les décès pour en établir l’inefficacité. Au demeurant, les équipes pourront, à loisir, choisir plutôt une « chère » molécule, développée par de puissants laboratoires pour vaincre une infection désormais en recul. Quelle belle perspective, pour ces généreuses sociétés, qu’une nouvelle indication.

 

Dernières nouvelles : un toubib américain a servi aux habitants de sa ville (Monroe, je crois), dès qu’ils en présentaient des symptômes établis ou qu’ils étaient fragiles, un traitement similaire à celui de notre marseillais : 500 patients traités, aucun mort, aucun intubé … « l’étude » sérieuse que l’on nous promet pour après le "pic épidémique" ne recensera ni ceux la, ni les patients marseillais traités hors étude et qui se remettent tranquillement de leur infection.

 

Ce n’est vraiment plus dans mes habitudes, mais je vais quand même aller me faire brûler un cierge.

 

Je finis … aux patients du wagon, en espérant leur guérison, à nous tous, quand le virus sera passé, que nous irons bien et que nous prendrons les trains pour d’heureux voyages :

ce poème d’Arthur Rimbaud :

L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.

 

Tu fermeras l’oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.

 

Puis tu te sentiras la joue égratignée…
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou…

 

Et tu me diras : « Cherche ! » en inclinant la tête,
– Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
– Qui voyage beaucoup…

 

 

 


Samedi 28 : une journée ordinaire


 

 

En fait, celle d’hier. C’est l’après-midi, nous entamons notre une balade kilométrique en vélo. En regardant bien sur la carte, nous dépassons parfois cette limite. Au fait, pourquoi un kilomètre ? Un coup d’oeil chez nos voisins : on y prescrit de ne circuler qu’entre gens de même confinement, de se tenir à plus de 5 mètres les uns des autres, recommandations simples et évidentes, pas de distance limite. Pour nous, les choses sont précises comme les ordres d’un adjudant. Dommage qu’elles émanent d’un éminent personnage, ministre de la République. Un qualificatif ? soyons sympa, c’est juste crétin. Il n’empêche, j’ai déjà dit : une démocratie, « c’est dirigé par le peuple, pour le peuple ». Si l’on accole le mot crétin au premier, que faire pour équilibre l’équation ? Je comprends mieux que l’on nous impose, chaque soir, sur nos écrans, le spectacle navrant d’amuseurs imbéciles ou de chroniqueurs idiots.  

 

Trêve de balivernes, en route : il n’y a pratiquement personne.  On croise une dame en voiture, elle est seule, un masque sur le nez. Elle s’écarte de notre route au risque de chuter dans les champs : je n’ai pas remarqué la couleur de ses cheveux. Plus loin, les travaux des champs. Dans notre campagne, pas besoin de faire lever l’armée des ombres, des volontaires, des solidaires : un bon tracteur suffit. Mais le printemps est aride, la terre trop sèche, ça fume. Le beau temps est précoce, les bêtes sont déjà au pré, l’herbe est belle. L’imposant troupeau de mon voisin change d’herbage : une longue file de bovins traverse notre route. Le petit hameau en bas de chez nous est près d’une voie ferrée que les trains ont désertée. Des bovins au pré, cornes coupées, l’œil vide :  privées de leur spectacle, les vaches s’emmerdent.  

 

Je retrouve, sur mon ordi, un topo que ma fille m’envoie. On y lit quelques conseils. Les médocs que je prends contre l’hypertension auraient des effets néfastes et diminueraient mes défenses immunitaires, celles qui me seront utiles au cas où … Comme d’hab, j’essaye de recouper l’info avec d’autres sources, reconnues ou antérieures à l’épidémie. Je trouve trace d’une diminution de nos ressources en zinc, et le fait que cet élément est utile à ces défenses. Justement, j’avais lu, dans le compte rendu de ce toubib US ayant soigné avec succès ses concitoyens avec le protocole marseillais, qu’il en avait enrichi la formule par une dose de cet élément. Bon, j’en rajoute juste un peu à mon automédication quotidienne. Notez bien, je fais tout avec mesure : ma quinine est naturelle, mes antiviraux à base d’huiles essentielles Ravinsara ou autre et la demi-pastille de zinc que j’ai rajouté peut- être inutilement, s’éliminera aussitôt dans mes urines.

 

Ce ne sont pas des médocs, pas un traitement, mais, si j’ai à faire face à l’infection et s’il ne s’agit pas de l’attaque d’une division de Panzers, mais seulement de quelques fantassins fatigués par une longue marche, ça peut faire la différence….  

 

Le second conseil est la fièvre, dont on assure qu’elle est une défense naturelle contre l’infection et qu’il ne faudrait pas trop la contrarier. J’en prends acte et je ne boufferai pas une boite de paracétamol dès les 38,2° atteint au soir.

Au demeurant, je reste sur les recettes de mon époque : gant frais sur le front et boissons chaudes. Pour elles, notez bien, ce sont plutôt des grogs, miel et bonne dose de rhum.

 

A ce propos, un souvenir de famille : mon père était un très jeune homme au moment de la terrible grippe espagnole. Le décor : dans Saint Claude, capitale de la pipe, des immeubles de rapport et les appartements, Rue de la Poya, au bout d’un long corridor, éclairés à peine, très loin du soleil.

A cette époque, beaucoup mourraient. Quand mon père en parlait, je me souviens l’avoir entendu parler de ce qu’il disait être « la dernière peste ».  Toute la famille était malade : quand se senti atteint, il but, selon ses dires, une pleine bouteille de Rhum Saint James, dormi, et se réveilla guéri

Bon, j’essayerais quand même de me limiter.

 

Avec tout ça, je n’avais pas vraiment le moral et il n’y avait, comme d’hab, rien à la TV. Il y a peu, on m’avait montré cette tente, hôpital de campagne des armées… Même transformée en théâtre, elle me rappela un film ancien : M A S Hla guerre de Corée, terrible, les salles d’opérations sous tente, les corps ouverts, le sang qui gicle … Un peu trash, mais sans doute fidèle à la réalité.

Les acteurs sont de joyeux carabins, indécents et paillards, réfractaires à toutes discipline … et, tout au long du film, en alternance, leurs farces, sans doute odieuses, et toujours, à deux pas, les horreurs de la guerre. 

 

Et si l’on ne guérissait de telles abominations, si l'on ne pouvait vivre, agir et faire plus qu’il n’est humainement possible, qu’en s’évadant, et, dans un rire, chasser les monstres de la nuit, ceux du « spleen » de Baudelaire, du Roi des Aulnes, ... surtout oublier le râle des mourants.

 

Je pense à vous souvent, soignants, toubibs, infirmières et « agents » (un très cher et très vieil ami Toubib me disait souvent son admiration pour le « petit » - on parlait ainsi avant – personnel des hôpitaux … il avait diantrement raison) – Portez-vous, dormez et, si vous le pouvez, riez, chasser les ombres de votre esprit … Ce n’est pas que de l’empathie, mais, au cas où j’en aurais besoin, j’aimerais vous trouver en bonne forme …

 

A plus …

 

NB : mes excuses à tous les adjudants dont j'ai malhonnêtement comparé les ordres avec ceux de notre premier ministre

 

 


dimanche 29 mars : en colère !


 

Ma télécommande a dérapé hier soir vers 18 heures, au moment de prendre ma bière et de regarder les émissions réservées habituellement aux personnes de mon âge. A la place, est apparu le mal rasé en chef, flanqué de ses tuteurs, ministres ou conseils, tous placés devant un tableau blanc. J’ai oublié de zapper et j’ai suivi l’intervention.

Le propos, en résumé :

Beaucoup de morts : demain sera pire,

Les masques et les tenues de protection : on en a manqué ? vous en aurez demain,

On vous a caché des morts : on va recompter,

Vous êtes confiné ? restez-y, on y veille

Pour un vaccin ? en 2021 sans doute – Des traitements efficaces ? on avance bien et dans quelques semaines, le pic épidémique enfin passé, on vous dira.

Mais surtout :

Ah, au fait, le truc du Marseillais, on veut bien, mais pas question de donner ça à tout le monde, surtout pas dès les symptômes établis et sur des gens encore valides. On donnera ça, ou autre chose, aux patients hospitalisés, donc déjà en insuffisance respiratoire…

 

Je comprends enfin : de ce côté, pas d’espoir, ce ne seront ni les conditions, ni le protocole envisagé par ce trublion. Si l’on veut bien utiliser sa molécule, ce ne sera, trop souvent, qu’en lieu et place d’une extrême onction.

Une nouvelle fois, je bondis.

Passe encore sur les autres sujets évoqués, il y a des efforts en manière de communication, mais ça ressemble trop à ce que je voyais, enfant, lorsqu’un écolier était surpris par le surveillant : les mêmes réponses. « J’ai fait le mieux que j’ai pu », « Je ne l’ai pas fait exprès », « ce n’est pas moi », « je ne recommencerais plus ». Pitoyable, seulement pitoyable, j’ai honte d’être français (et ce n’est pas la première fois !).

Mais, pour le Marseillais, ça ne passe pas. Quoiqu’il fasse, on sort l’artillerie. Il a de bons résultats ? pas assez. Il en d’autres, plus nombreux ? qui sait, ils auraient peut-être pu guérir tout seuls. Et puis, quelle outrecuidance !

 On lui oppose de grands noms, on mobilise les médias, on présente des analyses certes mitigées, mais sous un titre équivoque et le bandeau « fake news ? »

En plus, on voudrait en faire un gourou, c’est vrai que la personne s’y prête.

 

Mais en fait, qu’est-il, après tout ? se soucier, dans cette maladie, du virus et de l’infection qui la suit, interroger ses confrères chinois, chercher, dans sa pharmacie un anti-viral connu et sans vrais dangers (on en a filé à tous les militaires africains pendant des années, et aussi à tous les touristes, sans indications et jusqu’à peu, sans ordonnance), lui adjoindre l’antibiotique empêchant toute infection induite, cela, à vue de nez, procède d’une bonne pratique. Ni gourou, ni génie, simplement un bon médecin, sûrement un exemple pour ses confrères. Et c’est déjà beaucoup, c’est un très noble titre.

D’autres ne l’auront pas. Pontes, pontifes, pontifiants, drapés dans leurs principes, ils attendent. Les résultats viendront, trop tard, mais ils viendront. De nouvelles et chères molécules seront produites, la science avancera, certes, mais au pas d’intérêts privés, et sur quelques cadavres (combien ?).

Ils n’ont rien inventés. Hier un savant fou, sous le prétexte qu’un de ses lapins n’était pas mort de la rage, s’est permis d’inoculer un produit éminemment dangereux à un petit enfant : horreur !!

Les mêmes, aujourd’hui, ont le pouvoir. Les anciens ne l’avaient pas et le petit Joseph Meister a vécu. Les nôtres l’aurait tué.

J’aimerais quand même bien, sinistres badernes que vous ôtiez, au fronton de vos instituts et universités, le nom de mon illustre compatriote.

 

C’est une vraie colère, et que faut-il faire ?

Un pouvoir dictatorial, mais impuissant ou incapable, la suffisance criminelle des élites, et, en face, la misère, l’impuissance et la rage… certains y voit le ferment d’une révolution. Moi, je me méfie : j’ai appris mon histoire de France : Révolution, et derrière le peuple brisant les barreaux d’une prison, derrière les femmes en cheveux et les sans culottes, derrière les piques ornées de têtes humaines, il y avait de bons et gras bourgeois, des lumières (mais souvenez-vous, à l’époque, on s’éclairait à la bougie !) inspirés, pour certains, d’une belle révolution aux Amériques, où l’on avait chassé d’odieux colonisateurs, pas forcément pour libérer les esclaves, mais, d'après mes souvenirs étudiants, pour des questions fiscales. Méfiance…

Certes, nos « représentants » n’ont guère de légitimité : ont-ils été vraiment choisis, ceux pour lesquels nous ne décidions qu’entre Peste et Choléra ? Mais, pour la révolution, ses outrances et ceux qui la suive, l’œil bien fixé sur leurs petits intérêts, j’aimerai plutôt aux calendes (grecques, si possible)

 

Il reste un espoir :  la conscience de chacun, la possibilité et l’obligation de ne pas obéir à un ordre absurde, illégal, ou contraire à l’intérêt public. C’est valable pour vous, vos pères l’ont fait (pas tous, mais bon), sous Vichy, en Algérie pour rapatrier quelques-uns de nos fidèles et leur éviter une mort certaine, ou en refusant l’ordre de généraux factieux. D’autres ont au moins protesté …

 

Il me reste donc, si le virus rattrape mes 76 ans et mes quelques soucis médicaux, à espérer que d’autres auront le courage de la désobéissance, médecins ou pharmaciens, que d’autres laisserons faire, fonctionnaires, juges ou gendarmes, sinon, la prière (mais je crains que même en me recyclant, ça ne marche guère pour moi)

 

C’est l’heure d’aller manger, ça perturbe ces changements d’heure.

 

A demain, si Dieu veut,

 


30 mars : la colère, et après ?


 

Le petit ballet moderne qui nous a été proposé avant-hier a eu, au moins, le mérite de faire se lever beaucoup de colères … nous avons failli être majoritaires. Failli, seulement, il y aura toujours une bonne majorité d’indécrottables optimistes qui, accrochés à des planches pourries, pensent pouvoir rejoindre la rive, après avoir cru longtemps que le Titanic était insubmersible. Ils ont aussi cru que le vieux Maréchal allait sauver la France, que le grand Charles les avais compris, que Barre était le meilleur économiste de France ou autres fadaises. Je vous laisse terminer la liste, je n’aimerais pas que l’on me croisse partisan.

 

Mais, à part eux, que de grosses colères.

Rattrapés de plein fouet par l’accélération récente des suppressions d’hôpitaux, les réductions de personnels hospitaliers, le spectacle désolants d’Ehpad gérés avec avarice ou la destruction des réserves sanitaires d’intervention, nos petits maîtres avaient chaud aux oreilles.

On leur promettait la corde, au moins : il est bon de rêver, même quand on est de nature pacifique. Rêver, ce n’est pas grave : je me rappelle cet ami, opposé de toujours à la peine capitale, qui, remué par une affaire sordide de viol et de meurtre, me disait : « je suis contre la peine de mort, mais quand même, on pourrait leur arracher les couilles … ».

 

Je suis plus mesuré : après tout, ce ne sont que des tricheurs et j’imaginais plutôt, pour eux, le traitement que l’on réservait, dans les bandes dessinées, aux tricheurs du Far-West : le goudron, les plumes, et, à cheval sur un rail porté, reconduite aux frontières de l’état.

Bref, les gens étaient en colère, et gare à l’après pandémie. C’est bon de rêver, mais je suis un peu dubitatif.

 

L’après sera un grand soulagement : on fleurira les tombes, quelques aides ou facilités permettront aux confinés les achats qu’ils n’avaient pu faire. Pour beaucoup les affaires reprendront leur cours, avec encore plus de frénésie. Côté économie, je suis même plutôt optimiste. La vertigineuse chute des indices boursiers d’hier est bientôt oubliée, l’or se stabilise et les échanges, hausse ou baisse quelle importance, mais faits en nombre et à la vitesse de l’éclair, sont toujours aussi rémunérateurs. En Europe, on arrivera bien, lignes de crédit à l’appui et avec quelques aménagements à se refaire une monnaie unique présentable. Le principal, c’est que l’argent reste où il est toujours allé. On marquera les jalons de cette crise : quelques suicides de banquiers, et, pour les autres, une plus grande précarité et des mesures autoritaires : il en a toujours été ainsi, d’après certains.

 

Une autre issue ? j’ai peine à y croire… Perso, j’ai été élevé successivement, dans la religion (apostolique, catholique et romaine, faut pas déconner ...), dans le respect de la politesse, de mes instituteurs et des anciens, puis encore des principes républicains, des droits de l’homme, de la République et même des institutions, pour finir bêtement socialo, puis écolo ou enfin, par dépit, anar, mais tendance Proudhon (une rareté).

 

Avec tout ça, quand je regarde nos dirigeants, grands acteurs politiques ou économiques et chroniqueurs mondains, je me dis que décidément nous ne sommes pas du même monde (et pas seulement côté rillettes, dixit la pub.) En fait, comme dans certains films, nous vivons dans des univers parallèles. Le nôtre, demain ? si tout va bien, à l’écart du leur en tout cas, j’en rêve : nous d’un côté, heureux, décroissants et solidaires et eux, comme des cons, boursicotant en télé travail dans un paradis fiscal, friqués mais à la merci d’aléas économiques par eux eux-mêmes provoqués. Juste un rêve, comme le wagon rose, rêvé pour l’hiver par un certain Rimbaud, mais je n’y crois pas beaucoup.

 

Plus réaliste et plus immédiat je pense au directeur de notre ARS, lui qui, avec l’aide de politiques influents, a supprimé toutes les (petites ?) structures hospitalières du département, les transformant en asiles de vieux, jeté les parturientes sur les routes, réduit drastiquement les capacités des services d’urgences et tout récemment refusé d’indiquer notre score épidémique départemental. A cheval sur un rail, couvert de goudron et de plumes, je me verrai bien, avec quelques amis, le portant outre Brenne (d’après un ami, c’est notre frontière…)

 

Fini de rêver : je retourne à mes occupations ; Il fait une bise et un froid de chien : heureusement que l’on est confiné !

 

A+ …

 

ah ! on m’envoie ça, que j’adore :

https://www.facebook.com/elpulpoproducciones/videos/1460450287447974/?v=1460450287447974