04/04

4 avril : "de Versailles ..."


"Au lever, le Roi avait l’air sombre et soucieux. Le Grand Conseil trembla.

 

Au dehors de nos frontières, au Levant comme au Ponant, de tout petits pays se portaient mieux que nous. On y avait seulement examiné tous les sujets avec attention, délivré quelques banales médecines, donné d’avisés conseils et avec cela, agonisants et cadavres n’encombraient nullement les hospices.

De même, ultime injure, notre puissant voisin, ennemi d’hier et concurrent de toujours, avait l’outrecuidance de nous accorder l’aide de ses hôpitaux et carabins afin de suppléer aux nôtres.

La chose commençait à se faire jour et il fallait donner au peuple la certitude d’une action ferme et déterminée en faveur de son salut.

 

On rappela qu’en ces temps de grande peste chacun devait rester chez soi, éviter, plus que tout, les miasmes des voisins, et s’y claquemurer, attendant le passage de la terrible bête, priant et repentant.

Voyages et déplacements étaient déjà interdits. On tendit le licol, on raccourcit la longe : le peuple devait savoir que l’on veillait.

 

Las, Prévôts et constables étaient de piètres alliés dans le grand spectacle que l’on voulait lui donner.

On les vit se déplacer en grande troupe, leurs chefs en tête, mais bien trop rapprochés les uns des autres pour éviter la contamination. De plus, on les laissait le visage libre, bouche ouverte, échangeant avec tous les miasmes de la maladie. Cela manquait d’adresse : la faculté, justement, venant de préconiser l’usage constant d’un petit carré de tissu couvrant la bouche afin d’y tenir là ses propres germes.

De grandes maladresses furent commises, affaiblissant la portée des édits du Grand Conseil.

 

On vit le connétable de Paris, le heaume arrogant, débiter quelques sottises, bouche ouverte et à la face du monde. Il dût faire pénitence.

Dans une contrée de l’Est, toute couverte de forêts, on vit le Grand Intendant en interdire l’accès, alors qu’il n’y avait là que loups et fauves et qu’il s’agissait ainsi du seul endroit où l’on ne risquait pas de croiser l’horrible fléau.

 

Il fallait trouver d’autres conseils, édicter d’autres édits : le petit masque peut-être, mais surtout il fallait espérer en la découverte d’autres médecines, plus radicales, les seules à même de ramener promptement la paix dans le royaume.

 

Aux hôpitaux, les carabins et leurs aides n’en pouvaient mais, ils tombaient, pire qu’à Crécy nos nobles chevaliers. Les sujets pleuraient, maudissant le grand mal, le sort et souvent le Roi et ses Ministres : la situation était grave.

 

Derrière le Roi, le Grand Conseil mis genou à terre et pria."

 

Il fait beau et chaud, le soleil brille… il n’a pas plu depuis longtemps : j’imagine que les morilles ne sont pas encore sorties, faute d’humidité.

Pour nous, tout va bien mais on s’emmerde (sauf quand j'écris ce mot, ça aide...), et puis, on a beau positiver, il y a quand même pas mal de trucs qui font râler. Politiques, sommités et chroniqueurs s’affrontent sans cesse, mêmes arguments ou raisons, tels des lapins mécaniques. En face, de belles espérances, de belles solidarités, ça console.

 

Portez-vous, portons-nous bien et profitons de ce beau temps autant que nous pouvons ou que l’on nous y autorise –

A +