29/04

mercredi 29 avril : Paroles, ...


 

Le premier conseiller fut seul, hier, à donner nouvelles sur la fin de la quarantaine imposée au peuple. Il parla solennellement devant des représentants du tiers état, réunis en petit nombre mais pouvant, au nom de tous, lui adresser critiques ou même manifester par un vote accord ou désaccord. Cela ne pouvait avoir conséquence et, au demeurant, par les effets du suffrage les ayant désignés comme représentants, ils étaient grandement acquis à sa cause.

 

Le discours fût passablement ennuyeux mais fort long, à la manière de ces dictateurs des iles sud-américaines. L’essentiel de son premier propos fut de décrire par le menu la situation à laquelle on était parvenu. Par grande production de chiffres, il fit état des ravages passés du Mal et de son faible recul. Il attribua ce dernier, certes au travail des carabins, mais aussi aux bonnes mesures qu’il avait prises et à sa fermeté à maintenir chacun enfermé. Il alla même jusqu’à chiffrer le nombre des sujets qui, sans son action, eussent péris. Il fut moins disert sur les retards et manquements dans le début de la lutte, pas plus que sur les capacités affaiblies de nos hôpitaux

 

Lorsqu’il passa à un possible élargissement des sujets à la date qu’avait indiqué le Roi, on changea de registre. L’essentiel du propos fut d’évoquer les possibles mesures qui permettraient la circulation des travailleurs vers les ateliers et manufactures ainsi que la réouverture des échoppes et commerces. L’affaire était complétée par le retour prudent, mais effectif des enfants aux écoles ou garderies afin que chacun puisse retourner à ses affaires. Les quelques indications qu’il donna ne satisfirent guère : tout cela était fort imprécis, laissé à l’appréciation des intendants, échevins ou maîtres. Aussi, le mélange des gens sur les lieux de travail ou dans les diligences faisait prévoir et craindre le grand retour de la maladie.

Cet élargissement des sujets n’allait pas jusqu’à inclure, quelque soit les mesures ou précautions prises, les commerces de cuisine et boissons, les théâtres ou la fréquentation des plages. Bien pire en était que les messes restaient interdites à la communauté, dans cette période où tous les dévots voulaient implorer le Ciel afin qu’il écarte les œuvres du Malin,

 

 Le reste fut à l’avenant : on pourrait aller et venir, mais, sauf impératif besoin, sans s’éloigner de plus de 25 lieues et sous réserve que l’on se trouve dans un district sûr. Pour en déterminer la nature de ce dernier, on examinerait, bien sûr le nombre de malades que l’on avait su y éviter, mais aussi les capacités en soins qui, souvent, venaient d’y être fortement réduites. La mesure était rude.

Notre élargissement ne serait donc pas à notre bon vouloir ou judicieuse appréciation, mais à celle des intendants, véritables roitelets provinciaux…

 

Le Roi avait promis date, mesures communes à tous le royaume sauf exceptions, confiance dans la commune sagesse, et l’on se retrouvait, pour loisirs et vie ordinaire, dans un carcan à peine desserré et tenu par de serviles caporaux. Le premier conseiller ne manqua pas d’en marteler les limites, d’exclure voyages dominicaux ou visites amicales et de conseiller aux ainés un maintien aux hospices.

Ces limites proclamées, n’étaient pour certaines, ni en harmonie avec celles des travailleurs, ni égalitaires entre tous les sujets, ni, ce qui était pire, strictement nécessitées par l’indispensable lutte contre le Mal. Elles apparaissaient contraires aux grands principes et lois fondamentales du Royaume.

 

Le Roi était, nonobstant, resté silencieux. On en déduit que le premier conseiller avait pris le pas, imposé ses vues. Ce n’était pas coup d’état, mais cela jetait le trouble.

Par quelques paroles ou proclamations malheureuses, mesures excessives, son discours avait divisé au lieu de rassembler.

 

 

Chez nous :

 

Pas fini de ronger son frein …ni d’imaginer comment on peut contourner l’affaire… si ça se trouve, on pourra plus rapidement aller se balader en Suisse qu’en Bresse …

En plus, côté sanitaire, ça ne donne pas forcément le moral : on découvre de nouvelles formes de la maladie, ce matin, c’est pour les gamins …

et côté traitements ça ne va guère vite, entre essais randomisés, études statistiques et comités de lecture scientifique, on est parti pour durer, d’autant que ça a quand même l’air d’être une sacrée et fantasque vacherie, ce truc …

Je remonte mes chaussettes, j’avais le moral dedans.

 

A demain pour de plus agréables nouvelles