05/05

mardi 5 mai : la barbe ... (celle du premier)


Chronique du Royaume :

Le royaume se réveilla à l’aube de sa huitième semaine d’enfermement. Elle devait être la dernière des annoncées, mais on s’acharnait à agiter grande crainte du retour de la bête et menace de nouvelle prison. On montrait le tas de vieillards emportés, les cadavres qui sortaient encore, malades contaminés du mois dernier, qui, malheur aidant, arrivaient à leur fin. On cachait pareillement le peu de gens devant consulter ou le fait que, dans mains hôpitaux de province, alors même qu’on prévoyait dans leur district de maintenir strict contrôle, on ne voyait nul nouveau malade.

 On fustigeait aussi toute parole ou déclaration laissant supposer que le Mal s’éloignait. A cet effet, quelques serviteurs zélés recherchaient et faisaient publicité de tous faits ou écrits anciens pouvant jeter un doute sur les proclamations contraires ou faisant espoir.

 

Les scribes attachés au Conseil travaillaient avec ardeur sur les mesures et pratiques de ce premier élargissement des sujets. Les premières annonces avaient été confuses : on s’interrogeait. Hier, les échotiers avaient été en manque et n’auraient fait que répéter à l’envie un maigre brouet. On commençait seulement à avoir quelques renseignements ou indiscrétions sur ces mesures. Elles étaient bien et toujours de la même eau.

 Les scribes étaient des sortes de chats fourrés comme les décrivait ce bon François Rabelais dans son livre cinquième. Ne connaissant l’extérieur de leur cabinet que par imagination et lectures anciennes, ils décrétaient et condamnaient sans saine logique ni quelconque discernement. On ouvrirait des lieux étroits où les pestilences pouvaient renaître mais on tiendrait fermé les étendues où le Mal ne pouvait prendre racine. On tolérerait promiscuité dans les coches ou ateliers, mais les gens faisant exercice au milieu des champs devraient se couvrir le nez, tout comme les voyageurs seuls dans leur fiacre. Bien sûr, de nombreux gendarmes et auxiliaires surveilleraient le tout et taxeraient avec rigueur et de belle somme tout contrevenant.

On se croyait rêver, et naviguer, semblablement à Pantagruel et ses compagnons, dans les étranges mais parfois dangereuses îles précédant l’oracle de la Dive Bouteille. Pour beaucoup parmi le peuple, c’était d’autres dives bouteilles qui les tenaient en bonne raison dans cette tempête d’ineptes sentences.

 

Les choses avançant, le premier conseiller devait en faire l’annonce auprès des représentants de la Nation. Il avait déjà parlé aux représentants du Tiers, il lui fallait maintenant faire discours devant les Pairs du Royaume. Il y pointa sa barbe - qu’il avait étrange. Les Pairs étaient gens gras et vieux mais bien établis. De plus ils étaient proches et tenus par les baillis et échevins. C’étaient aussi gens de raison et d‘intérêt. Le discours fut long, on montra la bête, on combattit les détracteurs, on indiquât les mesures que l’on prendrait et les quelques pistoles que l’on distribuerait à de jeunes démunis.

En vain, la chambre des Pairs dit sa méfiance et lui fit affront. Il retournât à ses travaux, en quelque sorte la queue basse.

Son cabinet préparait encore et toujours quelques limites, parfois saugrenues, à l’élargissement des sujets. Le peuple grognait devant tant d’errements et incohérences.

 

On avait trop montré la bête, toute chose déjà décidée en supposait le vigoureux retour, qui seul les justifiait. Au Conseil, on priait, contre toute raison, pour que le Mal veuille bien, au moins un peu, montrer à nouveau le bout de son nez.

 

Chez nous :

 

Ça commence à faire long. Ma voisine déprime, je crains pour quelques copains et je pense que les psy vont avoir du travail. En fait, on n’aurait pas dû importer des quintaux de chloroquine, mais des tonnes de Xanax… A force de tourner dans le même kilomètre, je n’ai même plus envie de prendre mon vélo (même sans masque) M’en fout, je suis imperméable à la déprime et j’ai mes provisions de « dives bouteilles » …

La seule chose qui m’atteigne un peu, c’est cette espèce de privation de liberté sans justification ou nécessité réelle…. Mais aussi le fait, plus grave et plus problématique, que la plupart des gens s’en accommode.

En parlant de liberté, d’accord c’est par forcément la mienne ou ça ne l’a jamais été, mais ça a existé : le clip de fin :

 https://www.youtube.com/watch?v=Y7nPERmTefg

 

 A demain …