mon tandem ....


un tandem de Jacques Busset, mon tandem, son histoire ...


 

Brumeux premiers jours de cette année 2021 : j’ai la nostalgie de randonnées anciennes et lumineuses : je croise, tous les matins, dans mon hall, mon second et actuel tandem, et je rêve … Il fut fabriqué, il y a précisément 40 ans, par un constructeur lyonnais Jacques Busset. J’ai déjà raconté sur mon « site » le renouveau de mes anciens vélos, j’ai envie de faire l’historique de celui-ci.

 

C’était à l’époque de mes envies de grandes randonnées, au lendemain de notre premier Paris Brest Paris et dans l’espoir de futures épreuves : flèches Vélocio, Bordeaux Paris ou en attendant le prochain Paris Brest… .Nous étions un peu fous, mais, à l’époque, en dépit d’une tendance à m’endormir sur mon vélo après 20 heures de route, je trouvais la chose à mon goût et avait entraîné mon épouse dans cette déraison …

 

Les tandems adaptés à ce genre de pratique étaient rares : la plupart des « faiseurs » montaient des machines de cyclotourisme solides, mais dépassant le plus souvent les 20 kg, soit le poids de mon ancienne machine : à quoi bon, dès lors... Un ou deux parisiens, réputés mais hors de prix faisaient mieux, et puis, en cherchant un peu, je découvris un lyonnais : Jacques Busset.

C’est l’origine de ma rencontre avec l’homme, un grand gaillard, dans une échoppe de la rue de Vienne à Lyon. Il travaillait seul sur un marbre/bâti artisanal, qu’il adaptait à vos mesures, soigneusement calculées, et qu’il montait sur un mur de son atelier. L’homme était parfaitement capable, même dans ces conditions assez rustiques, de sortir un cadre dressé au millimètre et il n’utilisait que des « pattes droites » ne supportant aucune erreur. Ses machines avaient des bases AR les plus courtes possibles, la rigidité était le fruit des bons tubes « Reynolds série tandem », ovalisés à leur base, d’une liaison entre pédaliers limitée et ovale et de brasages renforcés. L’ensemble, équipée « randonneur » avec dynamo sous base, éclairage et garde boue, selles de cuir Brooks et monté sur pneus souples de 700x23 ne dépassait pas 16 kg. La mode, en ces années 80, était pour ce type de machine aux « longues chaînes » : pédalier et dérailleur sur le pédalier avant et à de grandes longueurs de tubes : tige de selle d’environ 7 cm (ou moins), peu d’écart entre les niveaux selle/guidons.

Pour le confort du passager, le boitier AR passager était surélevé et les deux selles se trouvaient pratiquement au même niveau.

La machine était à l’égal de meilleures machines des artisans les plus réputés et elle sortit de son atelier à temps pour mon premier Bordeaux Paris dont nous parcourûmes les 610 kms en 25 h 30 : mon meilleur temps …

 

Malgré l’absence de triangulation, la bête avait un rendement fabuleux. En outre, la conduite et l’équilibre de la machine étaient au-dessus de tout : nous y étions bien, parfaitement à l’aise ; que nous soyons les deux en danseuse ou que ma compagne lise les cartes à l’arrière. Le cadre ne montrait ses limites qu’à l’occasion de tentatives de sprint en danseuse pour défier mes confrères sur un sommet de bosse. Une limite aussi : le freinage… assuré seulement par deux étriers à tirage central. Il est vrai que ceux-ci étaient des « CLB2 », système ingénieux et « auto-bloquant » (les patins, entrainés par la jante, serraient de plus en plus fort sans que l’on dût intervenir).

 

Dans l’ensemble, j’avais touché la machine idéale.

La perfection n’étant pas de ce monde et les modes changeant, il subit au long de ces 40 années d’utilisation quelques modifications… Pour les premières, je modifiais la transmission plaçant un nouveau pédalier sur le boitier arrière et revenant ainsi à une chaîne plus courte et conforme aux nouvelles modes. Les parcours de longue randonnée étant le plus souvent relativement « plat », le braquet maximum fut poussé à un 56x12 un peu prétentieux. Je retirais aussi garde boue et éclairage, ce dernier remplacé par des systèmes sur piles plus performants qu’une dynamo classique

 

 

Les années passant, la sagesse venant et la machine vieillissant, d’autres modifications suivirent.

 

Je craignais pour la rigidité du cadre avec l’évolution de mon poids et le vieillissement des aciers, j’aurais aussi aimé un freinage plus net, des roues moins fragiles et l’émaillage serait bientôt à refaire …. Son constructeur ayant cessé son activité, je dus, dans les jeunes années du 21° siècle, faire avec les moyens du bord.

 Je résolus le problème du cadre grâce à un amateur éclairé de ma ville natale. Ce dernier, amateur de karting, fabriquait ses machines avec une méticulosité et une science tout à fait surprenante. En cela, il me rappelait le constructeur originel. Nous étudiâmes la chose et convinrent d’un renfort fin partant d’un triangle formé avec le haut du premier tube de selle et l’horizontal et rejoignant un autre triangle formé avec le début des bases AR et le tube de selle « équipier ». On renforça aussi la liaison haute entre le tube horizontal et la douille de direction… La rigidité du cadre devint alors l’égal des machines les plus résistantes et la pérennité du cadre fut assurée pour encore de très nombreuses années !!!

 

Le seul inconvénient fût un trop fort chauffage du petit tube téflonné assurant le passage interne du câble de frein… Je dû alors me résoudre à le faire passer par l’extérieur.

 

Je dû également refaire l’émaillage et n’obtenu de l’artisan qu’une copie de la marque « Jacques Busset » … mais, après plus de 20 ans et pour assurer les décades suivantes, il fallait que ce fût fait.

 

Pour le freinage, je recouru à un « stratagème » qui me garantissait au moins un freinage correct par temps humide : je doublais l’étrier arrière, doublant aussi les tirages centraux au moyen d’un câble posé sur cavalier.

 La dernière modification (heureuse) fut de faire monter une paire de roues sur moyeux annulaires à axe titane et jantes « RIGIDA  DP 28 » hautes et particulièrement résistantes. Je ne connus par la suite plus aucune casse de rayon…

 


 

La machine était devenue parfaitement adaptée à mes nouvelles pratiques … Elle est toujours ainsi : je passe devant tous les matins, espérant toujours l’enfourcher à nouveau pour quelques balades encore …. En 2021, peut-être, l’espoir fait vivre …